Des chercheurs de l'axe Vectorisation et Radiothérapies du Cancéropôle Grand Ouest testent de nouvelles stratégies pour traiter les cancers primitifs de l'os en limitant notamment la destruction de l'os par les tumeurs.
Touchant principalement les enfants et les adolescents, les cancers primitifs de l'os affichent des taux de survie à 5 ans de 50 à 70 % dans les meilleurs cas pour les formes localisées, mais de 20 à 30% en cas de métastases, de rechute ou de résistance au traitement. Un pronostic désolant qui n'a pas évolué au cours des 30 dernières années.
Bien qu'ayant des causes diverses et encore mal connues, ces cancers, qu'ils s'agissent del'ostéosarcome, du sarcome d'Ewing ou du chondrosarcome, semblent impliquer des dysfonctionnements cellulaires similaires.
« Il apparaît en effet qu'un déséquilibre entre l'action des cellules constructrices et des cellules destructrices du tissu osseux soit impliqué dans le développement de ces tumeurs, explique Françoise Rédini, chercheuse au laboratoire de physiopathologie de la résorption osseuse et thérapie des tumeurs osseuses primitives de Nantes, associée à l'axe Vectorisation et Radiothérapies du Cancéropôle Grand Ouest. En effet, dès lors qu'une cellule tumorale se développe en site osseux, on observe une résorption importante des os causant leur fragilisation (lésions, fractures…)». Comment expliquer cette dégradation ? Par quels mécanismes les cellules tumorales interagissent-elles avec les cellules de l'os ?
« Tout d'abord, il faut savoir que l'os est composé de trois types de cellules : les ostéocytes, les ostéoblastes et les ostéoclastes qui interagissent constamment », nous rappelle la scientifique. Ainsi, les ostéoblastes sont les cellules impliquées dans la formation de l'os; certaines d'entre elles peuvent progressivement s'y emmurer et devenir ainsi des ostéocytes, des cellules matures. Les ostéoclastes sont quant à elles chargées de la résorption osseuse. « Nous savons aujourd'hui que les cellules tumorales perturbent l'équilibre de ce système en libérant dans la matrice osseuse quantités de protéines appelées « facteurs de croissance » parmi lesquels les cytokines FGF, TGF-b ». Ces molécules ont la capacité d'activer les ostéoclastes entrainant non seulement d'importantes dégradations de l'os mais également la libération d'autres facteurs de croissance emprisonnés dans l'os. « Or, plus la quantité de facteurs de croissance dans le micro-environnement de la tumeur est importante, plus la tumeur prolifère. Aussi, nous cherchons à agir sur ces messagers chimiques afin de limiter l'action des ostéoclastes et rétablir ainsi l'équilibre entre destruction et formation de l'os », explique Françoise Rédini. Nous avons ainsi lancé en 2007 un premier essai clinique portant sur les effets d'une bithérapie combinant un traitement par chimiothérapie et un traitement par Zometa®, une molécule pharmaceutique habituellement utilisée pour freiner les pertes osseuses dues à l'ostéoporose ».
Les résultats de cette étude ne seront connus qu'en 2017.
Deux autres stratégies anti-cancéreuses sont étudiées à l'échelle de la cellule et de l'animal, dans l'équipe du Docteur Rédini. La première vise à inhiber l'expression de la protéine RANK-Ligand, laquelle agit également sur l'activation des ostéoclastes. La seconde cible quant à elle les cellules tumorales.
« Ces dernières sont, semble-t-il, les seules cellules à exprimer des récepteurs de mort cellulaire susceptibles d'être activés par une protéine appelée TRAIL. En mettant au point des molécules agonistes de TRAIL, capables d'activer l'apoptose, c'est-à-dire la mort par auto-destruction de la cellule, nous espérons pouvoir limiter la prolifération des tumeurs osseuses ».